C'est vachement commun qu'un truc me fasse péter une durite et créer un blog que j'abandonne deux mois plus tard.
La dernière fois c'était l'année dernière avec Scream Queens, j'avais passé les deux premiers épisodes à faire sauvagement des pauses toutes les deux secondes pour écrire tout ce que ça m'inspirait.
J'ai vu Cabin hier soir, et il a parlé à une partie de moi que je ne cherche pas souvent à mettre en avant, parce qu'elle est hors-la-loi, et que tout le monde la pense trop conne.
Chacun et chacune, face à un film, va se focaliser sur un point précis, un personnage à qui ielles s'identifient.
Je pense que ce qui fait qu'on aime vraiment, énormément un film, c'est quand ce point, ce personnage, était en fait un élément central, et donne tout son sens à l’œuvre.
Par exemple moi, je suis féministe. Donc je vais toujours regarder les façons dont le genre est montré et utilisé dans l'intrigue. Ça peut faire que je déteste des films qui m'auraient d'une autre façon plu, comme l'ignoble "A Boy and His Dog", tellement dégueulasse que mon auteure de sf féministe américaine préférée en a écrit une putain de bonne critique qui déchire tout (allez vous faire foutre, les garçons de droite)
Tiens, si tu veux kiffer ta race et apprendre des trucs sur le marxisme : https://www.ejumpcut.org/archive/onlinessays/jc12-13folder/BoyDogRuss.html
Je te conseille d'avoir vu le film dont on parle avant, tu te sentiras sale mais c'est pour mieux que Russ te lave mon enfant (ahah "Russ", c'est pour ça qu'elle est coco la conne)
Mais être féministe, à part avec certaines personnes (souvent des hommes blancs cis hétéros) c'est quelque chose dont tu peux être fière, que tu peux défendre.
Un autre aspect de ma personnalité c'est que j'ai de gros troubles mentaux. Mais encore une fois, ça peut être valorisé, car ce n'est pas un choix, mais une fatalité, et je traîne dans de nombreux cercles neuroatypiques bienveillants.
Mais il y a un truc, qui me distingue de mes ami-es féministes : c'est que je me drogue comme jamais.
Je fume quotidiennement, je bois beaucoup, parfois je prend de l'acide toute seule, comme ça, parce que c'est plus rigolo qu'avec des gens, parfois j'ai du speed et je m'en met plein le nez dès le matin, et puis, je bois. Glouglouglou, je bois beaucoup.
Je connais des gens qui ont ce mode de vie : la plupart, des hommes blancs cis hétéros.
Avec eux, pas de jugement sur mes habitudes néfastes, mais en revanche, si je me risque à dire "oh tiens c'est un peu que blanc et masculin la scène noise actuelle" ou "oui mais ces mecs qui font de la harsh ils sont autistes mais comme c'est une maladie de mec ça passe mieux" ou "c'est un peu raciste tes affiches qui exotisent les noirs" ou n'importe quoi je me fait défoncer.
Donc je dis rien, je ferme ma gueule, sauf quand j'ai assez pris de speed, là ils se mangent ma diatribe et généralement ça les met bien mal à l'aise.
Et dès que je traîne avec des militants, ou juste des gens déconstruits, bah je me sens la grosse junkie de base, je peux pas en parler, ou dire que c'est cool, la drogue.
Parce que oui, parfois, quand on se tape des crises d'angoisse, quand sortir est une torture, quand les autres semblent une menace, la seule solution c'est un joint.
J'en entends au fond qui me disent "nan mais tout ça là ce que tu décris c'est le résultat de la fumette hein c'est bien connu ça rend paranoïaque".
Alors écoute moi bien Einstein, déjà si tu veux m'interrompre pour dire des bêtises tu te met pas au fond, tu viens au premier rang.
Ensuite c'est gentil de vouloir prendre ton cas pour une généralité sauf que CA NE MARCHE PAS.
J'ai précisé au début souffrir de troubles mentaux.
Nos chimies ne sont pas les mêmes.
Je ne conseillerais à personne ne souffrant pas des mêmes maladies que moi de faire ce que je fais, ni même d'ailleurs à quelqu'un souffrant pareil, parce qu'on ne sait jamais comment les gens réagissent aux substances.
Mais vouloir m'empêcher de faire la seule chose qui me calme sous prétexte que ça ne rentre pas dans ta vision étriquée de ce que fait et ne fait pas la drogue, c'est franchement de la merde, et tu mériterais de te faire manger par un homme-sirène pour ça.
J'ai attendu mes 23 ans pour découvrir les drogues dites "dures", les chimiques, j'ai attendu parce qu'avant je ne me connaissais pas, je me cachais trop de choses, ou peut-être tout simplement je ne m'acceptais pas comme je suis, avec mon cerveau magnifique et torturé, avec toutes ces erreurs que j'appelle mon passé, avec mes putains de grosses failles, et surtout ma putain d'envie d'être vrai vaille que vaille, coûte que coûte, et tant pis, si ça m'a couté des années, elles ne sont pas perdues, elles se sont écoulées dans des ténèbres qui ne me font plus peur.
"han oui mais le rapport avec le film là c'est quand ?"
c'est maintenant
SPOILERS ZONE
Marty, un des personnages du film, a la particularité de fumer beaucoup de joints, et de bongs.
On pourrait supposer que c'est parce que la fume c'est cool et qu'il est bien benêt.
Non.
Marty, qui fume VRAIMENT beaucoup, souffre probablement d'anxiété généralisée, et peut-être, d'Asperger. La ou ses copains s'imaginent un cerveau mité par la drogue, avec plein de trous, les vrais, comme moi, savent que toute cette fumée peut aussi dissimuler un cerveau qui fonctionne à mille à l'heure, faisant des miliers de connections, et surtout un cerveau qui se prépare au pire, constamment.
Marty est le seul à ne pas avoir de réaction typique de film d'horreur : il ne veut pas aller dans la cave, il ne veut pas qu'ils se séparent, il a peur constamment, et en fait c'est du BON SENS.
L'explication donnée est que l'herbe l'immunise contre les produits qui ont rendus teubés les autres, mais moi je pense que c'est juste la psychologie du fumeur qui l'immunise contre prendre des décisions cons.
Déjà, en temps que fumeur, t'es hors-la-loi. Tu sais que les flics peuvent te chopper, veulent te chopper. T'es déjà un peu habitué à vivre dans un monde qui te veut du mal, tu sais remettre en question l'autorité, et tu te méfies comme d'un dingue de la surveillance.
À noter que les personnages sont tous blancs, ou avec en tout cas un bon gros white-passing, ça aurait été intéressant d'avoir un personnage racisé, qui lui aussi sait que la police n'est pas ton amie. Etant blanche je peux pas aller plus loin sur la réflexion mais si quelqu'un ou quelqu'une a envie de creuser le sujet des persos racisés dans les films d'horreur...
Ensuite : pourquoi les fumeurs fument ?
"parce que c'est des parasites qui veulent toucher le rsa en se touchant la nouille ?"
non
"parce que c'est cool pour faire la fête ?"
ok mais dans ce cas, pourquoi matin midi et soir
"euh...parce qu'il est accro ?"
OUI, ça c'est sûr, mais aussi
-parce qu'il en a besoin pour se calmer
-parce qu'il en a besoin pour se concentrer
-parce que son flot de pensées a besoin d'être régulé
-parce qu'il a peur, de lui, de l'humanité. Il le dit au début. La société à besoin d'être remise à neuf, et tout le monde est trop effrayé pour le faire. Il le dit en roulant un joint.
Les ami-es avec qui je regardait le film ont été un peu déçues de voir que le personnage de la fille, à un moment donné, péte complètement un câble, alors que lui reste calme.
Ma théorie dessus, c'est que la rousse là, elle va bien dans sa tête. Alors tout ce qui lui arrive, ça lui fait un choc : déjà c'est beaucoup de choses irrationnelles, irréalistes, qui ne sont pas sensées exister. Ensuite elle a assisté à la mort de 2 de ses camarades.
Marty lui, il vit déjà à moitié dans un monde ou l'apocalypse est présente. C'est un gros, gros paranoïaque.
Ensuite il n'a assisté à la mort de personne, il a juste évité une tentative de meurtre, ce qui produit de l'adrénaline, au lieu de tétaniser.
Enfin, depuis le début, il sent que tout le monde fait des bêtises, il est tellement tendu que voir des menaces concrètes lui fait un bien fou.
Perso je stresse pour prendre le train mais face à un vrai danger je reste stable.
Un vrai danger signifie qu'il faut se concentrer sur la chose, un vrai danger signifie qu'il n'y a ni passé ni futur, juste l'instant T, ça stoppe les pensées à mille à l'heure, ça stoppe aussi la haine de soi, les ressassements, les remords, les regrets, ça t'empêche de partir trop loin.
Je sais que mon grand-père était pareil. Un homme impulsif, parfois violent, mais qui restait stoïque et pragmatique face à des choses un peu graves, comme tomber en panne d'essence dans le désert.
J'aurais bien aimé être mon grand-père mais c'est l'apanage des hommes cis blancs hétéros du XXème siècle de pouvoir se conduire en salauds et d'être quand même aimés.
Donc voilà, tout ça pour dire que The Cabin in the Woods est le premier film que je vois ou le fumeur de joints a raison, et où ses actions peuvent s'expliquer si on part du principe que les fumeurs le sont pour des raisons mentales antérieures.
Et je partais de ce principe.
Bonne nuit.