mardi 3 janvier 2017

Mademoiselle Candy chez les fantômes ou le complexe Akira

Ça m'a vachement fait penser à Gravity Falls quand même

Je viens de voir Thir13en Ghost (2001) suite à une discussion sur un film d'horreur que je voulais faire dans mon appart avec un de mes potentiels fantômes monstrueusement angoissant.
Clairement, je vais pas avoir le budget "explosage de zonmé" à la Zabriskie Point pour le final, mais c'était assez exaltant de regarder les apparitions en mode, "comment faire la même chez moi avec trois clous un rideau et un bon d'achat de deux euros cinquante-sept à Casa".
Attends, pourquoi je voulais faire cet article déja ?
Ah oui.
Pour le passage avec Miss Candy (Matilda 1996) dont la fin ressemble beaucoup à la fin de Kaori dans Akira, petit rappel spoiler parce qu'en fait c'est pas grave de te spoiler ça, parce que le film est beaucoup trop dense pour qu'on puisse en diminuer la valeur en dévoilant un aspect narratif, qui n'est pas le plus important.
C'est curieux de voir comment meurent les femmes au cinéma.
Montage zonmé avec les compliments derechef

lundi 12 décembre 2016

Pourquoi les films français ne m'aiment pas

Une fois je suis allée voir Asphalte en avant-première et c'était vachement bien, je me souviens que c'était le jour d'après la mort de Chantal Ackermann, mort que j'avais ignorée parce que je savais pas qui c'était, et Mr Benchetrit nous avait expliqué qu'il avait forcé son équipe à regarder ses films pour qu'ils apprennent à tourner dans un petit espace.
C'était super intéressant et j'ai appris plein de trucs, et c'était un bon film et j'aime bien tous ses films et c'est pour ça que j'ai attendu pour lui parler à la fin et lui dire, en substance, j'ai super honte de l'écrire mais il me faut l'exorciser, c'est un blog sur le cinéma,
que j'adorais Janis et John parce qu'à chaque fois je pleurais parce que sa femme était morte.
Voilà.
Pour dire que parfois, j'ai pas de grande phrase, nan, à la place je contribue activement à faire du monde un endroit pourri.

Pourquoi j'aime pas les films français


Les Combattants (2014) c'est un film que j'ai vu que je voulais pas voir parce que j'aime pas les films français. Mais comme c'est pas une raison suffisante je l'ai regardé en scrognognognant dans ma be-bar imaginaire "ohlalala une meuf qui veut faire l'armée ohlalala une histoire d'amour vazy que je te regarde sans rien dire pendant deux heures que je parle laconiquement m'allonge sur ton lit et te demande si je dois enlever mes vêtements"
Et en fait
Ce film parle d'une crainte qui me constitue littéralement depuis que j'ai huit ans.
Ca m'a façonnée, cette crainte.
Je dirais pas que je suis une millenial, une génération y, je dirais que je suis de la génération de la Fin du Monde.
"ouais mais ta mère elle a vécu la Baie des Cochons c'est eux la génération atomique bunkers et compagnie"
Oui ok mais ils avaient peur d'une annihilation soudaine et immédiate.
Je parle de Fin du Monde Tel Que Nous Le Connaissons.
Je parle d'un processus engendré bien avant ma naissance et dans lequel je baigne depuis que je sais lire et ainsi m'informer sur le monde autrement qu'empiriquement.
Je parle de quand les adultes te disent "C'était Mieux Avant"
Je parle d'animaux qui disparaissent, d'animaux disparus,
d'épuisement des ressources,
de montées des eaux

et Madeleine, la protagoniste principale, elle veut faire l'armée parce qu'elle SAIT qu'elle va connaître la fin du monde de son vivant, et elle veut survivre, contrairement à tous ces bouseux sur leurs téléphones qui mangent des plats préparés ou construisent des abris qui tiennent pas la route.
Elle s'en tape de la solidarité/soumission/dévouement/camaraderie/sens du devoir que l'armée a pour but de lui inculquer (dans ce film, hein, dans ce film ou on t'apprend à te sacrifier pour les autres dans une version améliorée de Jungle Speed), elle veut pas qu'on l'aide à franchir des fossés Madeleine, parce que quand elle en aura besoin, de cette capacité là, elle sera seule, 
Bizarrement elle est super déter mais ne parle jamais d'apprendre à faire un potager ou vivre en autonomie, sujet de Captain Fantastic, que j'aborderais probablement plus tard.
Nan elle, elle veut être la meilleure, savoir se démerder TOUTE SEULE, car ayant étudier la macro économie elle est consciente, contrairement à ce que beaucoup de politiques de tout bords voudraient faire croire, de l'interraction constante des gens, l'interdépendance de nos sociétés globalisées ou de nos systèmes les plus locaux. Et elle en sait la fragilité. Elle sait que quand le monde, tels qu'ils le connaissent, s’effondrera, ces systèmes n'y survivront pas.

Au final elle s'en fout de vivre, je crois surtout qu'elle veut pas mourir piégée, mourir à son insu.
Maintenant qu'elle sait sa façon de l'appréhender, c'est en apprenant à se débrouiller seul dans des conditions horribles : donc la division des parachutistes dragons ça la botte, Madeleine (comme ça doit être très hard de faire de la montgolfière avec un dragon je pense que c'est cette division là)

C'est là où on se ressemble pas, dans notre peur de la Fin du Monde Tel Qu'on Le Blabla, mais tout au long du film j'ai eu l'impression qu'on avait la même vision du schmilblick, de ce monde où personne ne se débrouille seul.

Nous sommes tous au milieu d'un inextricable circuit de dons et de contre dons, de capacités, de savoir-faire nécessaire et partagé, collectivisé, archivé, distribué, arraché, repris, échangé, volé, perdu, retrouvé, amélioré, passé, repassé, appliqué, lu, rêvé, pensé, repensé, écrit, équeucétéra.

Quand j'étais petite ça me fascinait.
Je me souviens d'être dans une salle avec plein d'objets ramenés de voyages faits bien avant que je naisse, des objets de pays qui n'existaient plus, de civilisations disparues, et un mur, un mur entier de LIVRES.
Quand je pensais aux gens qui l'avaient lu dans cette maison, à la personne qui l'avait acheté, puis vendu, aux gens qui avaient touché cet exemplaire précis, et puis quand je pensais à la personne qui l'avait imprimé, à tous les gens qui travaillaient dans cette imprimerie, au nombre d'exemplaires, au nombre de gens qui l'avaient acheté, vendu, lu, qui avaient réfléchi, reposé le livre les yeux dans le vague, qui l'avaient aimé, qui l'avaient détesté, qui en avaient parlé à leurs amis, et puis quand je réalisais que parmi eux il y avait des réeditions d'écrits parus avant l'imprimerie, avant l'an zéro de l'ère chrétienne, quand je pensais au nombre de gens qui avaient eu un rapport avec ces livres, et au nombre de livres dans la bibliothèque sur le mur, et dans la maison, dans la médiathèque de chez moi, dans le monde...
Je crois que ça me desesperais de savoir que je ne pourrais pas tout lire, pas tout appréhender.
Qu'il existerait toujours un monde, à côté de moi, dans le monde, que je ne verrais pas.
Au final c'est celui là qui part, qui finit, c'est Katmandou qui s'effondre et moi qui me revait hippie.

Et voilà : c'est pour ça que je peux pas piffrer les films français.

Parce que j'y ai repensé, aux Combattants, j'ai du expliquer à des gens pourquoi je le trouvais intéressant, pourquoi on pouvait en parler, en tirer des questions existencielles.
J'y ai repensé chez moi, en me servant un petit rouge, et puis je suis tombée sur la clé de voute de l'édifice mal joué et un peu lent de Thomas Cailley : "Survivre, est-ce "sous-vivre" ?"

Et je pourrais en parler pendant des heures, moi, petite intello bobo, après y avoir réfléchi, après avoir ETE FORCEE de l'analyser pour en tirer quelque chose.

Et y'a plein de films où sans l'analyse il reste quand même une heure trente de ta vie que tu regrettes pas.
C'est pas difficile.
"ouais mais c'est du néoréalisme poétique c'est du Prévert par des chemineaux c'est beau"
Oui d'accord c'est beau mais enfin bon, c'est de l'onanisme intellectuel.
Je veux dire, j'adore, c'est la raison pour laquelle je frétille devant un Quentin Dupieux, parce que le mec va vite. Il contemple pas ses idées en se disant "oh putain c'est profond ma gueule", il les pousse à fond.
Bien sûr c'est pas la même, Dupieux s'en contrebranle de la fin du monde, hé, ho.
Mais c'est pas parce qu'on est français qu'on doit faire des Films Français. La façon de jouer ces émotions profondes est tellement légère qu'on peut passer à côté de la majorité du propos, sauf si on a le temps et l'envie, et personne n'a souvent les deux.
Ça a fait un carton au box office alors j'imagine que des gens ont du kiffer, moi-même j'ai kiffé, mais j'estime être co-réalisatrice du kiff du film, quand parfois je ne suis que la kiffeuse

The Cabin in The Woods - 2011

C'est vachement commun qu'un truc me fasse péter une durite et créer un blog que j'abandonne deux mois plus tard.
La dernière fois c'était l'année dernière avec Scream Queens, j'avais passé les deux premiers épisodes à faire sauvagement des pauses toutes les deux secondes pour écrire tout ce que ça m'inspirait.

J'ai vu Cabin hier soir, et il a parlé à une partie de moi que je ne cherche pas souvent à mettre en avant, parce qu'elle est hors-la-loi, et que tout le monde la pense trop conne.

Chacun et chacune, face à un film, va se focaliser sur un point précis, un personnage à qui ielles s'identifient.
Je pense que ce qui fait qu'on aime vraiment, énormément un film, c'est quand ce point, ce personnage, était en fait un élément central, et donne tout son sens à l’œuvre.

Par exemple moi, je suis féministe. Donc je vais toujours regarder les façons dont le genre est montré et utilisé dans l'intrigue. Ça peut faire que je déteste des films qui m'auraient d'une autre façon plu, comme l'ignoble "A Boy and His Dog", tellement dégueulasse que mon auteure de sf féministe américaine préférée en a écrit une putain de bonne critique qui déchire tout (allez vous faire foutre, les garçons de droite)

Tiens, si tu veux kiffer ta race et apprendre des trucs sur le marxisme : https://www.ejumpcut.org/archive/onlinessays/jc12-13folder/BoyDogRuss.html
Je te conseille d'avoir vu le film dont on parle avant, tu te sentiras sale mais c'est pour mieux que Russ te lave mon enfant (ahah "Russ", c'est pour ça qu'elle est coco la conne)

Mais être féministe, à part avec certaines personnes (souvent des hommes blancs cis hétéros) c'est quelque chose dont tu peux être fière, que tu peux défendre.

Un autre aspect de ma personnalité c'est que j'ai de gros troubles mentaux. Mais encore une fois, ça peut être valorisé, car ce n'est pas un choix, mais une fatalité, et je traîne dans de nombreux cercles neuroatypiques bienveillants.

Mais il y a un truc, qui me distingue de mes ami-es féministes : c'est que je me drogue comme jamais.
Je fume quotidiennement, je bois beaucoup, parfois je prend de l'acide toute seule, comme ça, parce que c'est plus rigolo qu'avec des gens, parfois j'ai du speed et je m'en met plein le nez dès le matin, et puis, je bois. Glouglouglou, je bois beaucoup.

Je connais des gens qui ont ce mode de vie : la plupart, des hommes blancs cis hétéros.
Avec eux, pas de jugement sur mes habitudes néfastes, mais en revanche, si je me risque à dire "oh tiens c'est un peu que blanc et masculin la scène noise actuelle" ou "oui mais ces mecs qui font de la harsh ils sont autistes mais comme c'est une maladie de mec ça passe mieux" ou "c'est un peu raciste tes affiches qui exotisent les noirs" ou n'importe quoi je me fait défoncer.
Donc je dis rien, je ferme ma gueule, sauf quand j'ai assez pris de speed, là ils se mangent ma diatribe et généralement ça les met bien mal à l'aise.

Et dès que je traîne avec des militants, ou juste des gens déconstruits, bah je me sens la grosse junkie de base, je peux pas en parler, ou dire que c'est cool, la drogue.
Parce que oui, parfois, quand on se tape des crises d'angoisse, quand sortir est une torture, quand les autres semblent une menace, la seule solution c'est un joint.
J'en entends au fond qui me disent "nan mais tout ça là ce que tu décris c'est le résultat de la fumette hein c'est bien connu ça rend paranoïaque".

Alors écoute moi bien Einstein, déjà si tu veux m'interrompre pour dire des bêtises tu te met pas au fond, tu viens au premier rang.
Ensuite c'est gentil de vouloir prendre ton cas pour une généralité sauf que CA NE MARCHE PAS.
J'ai précisé au début souffrir de troubles mentaux.
Nos chimies ne sont pas les mêmes.
Je ne conseillerais à personne ne souffrant pas des mêmes maladies que moi de faire ce que je fais, ni même d'ailleurs à quelqu'un souffrant pareil, parce qu'on ne sait jamais comment les gens réagissent aux substances.

Mais vouloir m'empêcher de faire la seule chose qui me calme sous prétexte que ça ne rentre pas dans ta vision étriquée de ce que fait et ne fait pas la drogue, c'est franchement de la merde, et tu mériterais de te faire manger par un homme-sirène pour ça.
 J'ai attendu mes 23 ans pour découvrir les drogues dites "dures", les chimiques, j'ai attendu parce qu'avant je ne me connaissais pas, je me cachais trop de choses, ou peut-être tout simplement je ne m'acceptais pas comme je suis, avec mon cerveau magnifique et torturé, avec toutes ces erreurs que j'appelle mon passé, avec mes putains de grosses failles, et surtout ma putain d'envie d'être vrai vaille que vaille, coûte que coûte, et tant pis, si ça m'a couté des années, elles ne sont pas perdues, elles se sont écoulées dans des ténèbres qui ne me font plus peur.

"han oui mais le rapport avec le film là c'est quand ?"
c'est maintenant
SPOILERS ZONE

Marty, un des personnages du film, a la particularité de fumer beaucoup de joints, et de bongs.

On pourrait supposer que c'est parce que la fume c'est cool et qu'il est bien benêt.
Non.
Marty, qui fume VRAIMENT beaucoup, souffre probablement d'anxiété généralisée, et peut-être, d'Asperger. La ou ses copains s'imaginent un cerveau mité par la drogue, avec plein de trous, les vrais, comme moi, savent que toute cette fumée peut aussi dissimuler un cerveau qui fonctionne à mille à l'heure, faisant des miliers de connections, et surtout un cerveau qui se prépare au pire, constamment.

Marty est le seul à ne pas avoir de réaction typique de film d'horreur : il ne veut pas aller dans la cave, il ne veut pas qu'ils se séparent, il a peur constamment, et en fait c'est du BON SENS.
L'explication donnée est que l'herbe l'immunise contre les produits qui ont rendus teubés les autres, mais moi je pense que c'est juste la psychologie du fumeur qui l'immunise contre prendre des décisions cons.

Déjà, en temps que fumeur, t'es hors-la-loi. Tu sais que les flics peuvent te chopper, veulent te chopper. T'es déjà un peu habitué à vivre dans un monde qui te veut du mal, tu sais remettre en question l'autorité, et tu te méfies comme d'un dingue de la surveillance.

À noter que les personnages sont tous blancs, ou avec en tout cas un bon gros white-passing, ça aurait été intéressant d'avoir un personnage racisé, qui lui aussi sait que la police n'est pas ton amie. Etant blanche je peux pas aller plus loin sur la réflexion mais si quelqu'un ou quelqu'une a envie de creuser le sujet des persos racisés dans les films d'horreur...

Ensuite : pourquoi les fumeurs fument ?
"parce que c'est des parasites qui veulent toucher le rsa en se touchant la nouille ?"
non
"parce que  c'est cool pour faire la fête ?"
ok mais dans ce cas, pourquoi matin midi et soir
"euh...parce qu'il est accro ?"
OUI, ça c'est sûr, mais aussi
-parce qu'il en a besoin pour se calmer
-parce qu'il en a besoin pour se concentrer
-parce que son flot de pensées a besoin d'être régulé
-parce qu'il a peur, de lui, de l'humanité. Il le dit au début. La société à besoin d'être remise à neuf, et tout le monde est trop effrayé pour le faire. Il le dit en roulant un joint.

Les ami-es avec qui je regardait le film ont été un peu déçues de voir que le personnage de la fille, à un moment donné, péte complètement un câble, alors que lui reste calme.
Ma théorie dessus, c'est que la rousse là, elle va bien dans sa tête. Alors tout ce qui lui arrive, ça lui fait un choc : déjà c'est beaucoup de choses irrationnelles, irréalistes, qui ne sont pas sensées exister. Ensuite elle a assisté à la mort de 2 de ses camarades.
Marty lui, il vit déjà à moitié dans un monde ou l'apocalypse est présente. C'est un gros, gros paranoïaque.
Ensuite il n'a assisté à la mort de personne, il a juste évité une tentative de meurtre, ce qui produit de l'adrénaline, au lieu de tétaniser.
Enfin, depuis le début, il sent que tout le monde fait des bêtises, il est tellement tendu que voir des menaces concrètes lui fait un bien fou.

Perso je stresse pour prendre le train mais face à un vrai danger je reste stable.
Un vrai danger signifie qu'il faut se concentrer sur la chose, un vrai danger signifie qu'il n'y a ni passé ni futur, juste l'instant T, ça stoppe les pensées à mille à l'heure, ça stoppe aussi la haine de soi, les ressassements, les remords, les regrets, ça t'empêche de partir trop loin.
Je sais que mon grand-père était pareil. Un homme impulsif, parfois violent, mais qui restait stoïque et pragmatique face à des choses un peu graves, comme tomber en panne d'essence dans le désert.
J'aurais bien aimé être mon grand-père mais c'est l'apanage des hommes cis blancs hétéros du XXème siècle de pouvoir se conduire en salauds et d'être quand même aimés.

Donc voilà, tout ça pour dire que The Cabin in the Woods est le premier film que je vois ou le fumeur de joints a raison, et où ses actions peuvent s'expliquer si on part du principe que les fumeurs le sont pour des raisons mentales antérieures.
Et je partais de ce principe.
Bonne nuit.